Lundi 18 juin 1 18 /06 /Juin 07:09

Ou la métamorphose collective, en toute bonne conscience, d'une victime en coupable...

S O R T I E

 

 

 

- C’est pas vrai qu’ils ont embarqué Rossero ?… 

- Si !… Rossero… Mangin aussi… Et puis Flamire… Il y en aura d’autres il paraît… Beaucoup d’autres… Tout un remue-ménage ça fait… On parle plus que de ça…

- C’est Mangin qui ramenait la drogue ?

- C’est pas la drogue, non !… Pas cette fois-ci… Non… Il paraît qu’ils auraient coincé une fille toute une bande dans les hangars là-bas… là où Fardon avait son dépôt avant… Qu’ils l’ont entraînée de force et qu’ils l’ont obligée à… vous voyez ce que je veux dire…

- Rossero !… Et Flamire !… C’est pas possible… Non, c’est pas possible… Et c’est qui la fille ?

- Une petite Chrystelle Le Cloëdec… ou Le Claëdec… Quelque chose comme ça…

- Connais pas…

- Moi non plus… Ca me dit rien…

- Le Cloëdec… Ah, mais si, si !… Ca doit être sur le plateau là-haut… Si, ça doit être ça… Ils viennent de Quimper ou quelque part par là… Un grand type pas causant… Un moment il parlait de se lancer dans l’immobilier… Ou les assurances… Oui, ça doit être ça…

 

 

- Comme quoi… Comme quoi il y a quand même une justice… On en parlait justement hier soir… On disait : Vous allez voir que demain ils seront tous dans le journal sauf lui… Ils vont bien encore trouver moyen d’arranger ça et de noyer le poisson… Comme à chaque fois… Eh bien non !… Ils ont eu beau faire, se démener comme de beaux diables - et que je te téléphone à droite et que je te téléphone à gauche et que je te sors la voiture à onze heures du soir - eh bien relations ou pas leur Florian il a quand même bien fallu qu’il soit dans le journal avec les autres… Ah, sûr que ça doit leur faire drôle de se voir comme ça à côté des Frémont et des Mangin… Ils feront peut-être un peu moins leurs fiers maintenant…

 

 

- Qu’est-ce que tu me chantes là ?… Mais bien sûr qu’on va la gagner cette finale… Tu les as vus les autres en face ?… C’est des gonzesses !... Et mon muscadet, Marcel, il arrive ou quoi ?… Comme dans du beurre ça va rentrer… Comme dans du beurre…

- Riri, lui, il dit que…

- Riri… Riri… C’est chaque fois pareil Riri… Il nous annonce les pires catastrophes et il nous gagne ça les doigts dans le nez… Non… Trente pions on va leur mettre, tu vas voir…

- Sans Flamire et Rossero…

- Mais ils seront revenus, tu parles !… Ils seront revenus !… T’imagines quand même pas qu’ils vont les garder…

- Pourtant les avocats…

- Les avocats… Evidemment les avocats… Pas fous les avocats… Ils y passent tous les jours, ils les baratinent cinq minutes et ils ramassent le pactole à chaque fois… Alors faut pas compter que ce soit eux qui lèvent le petit doigt pour les faire sortir… C’est comme ça les avocats… Ca sait faire que calculer… Essaie de divorcer pour voir… Mais les juges ils les connaissent les avocats, tous leurs petits manèges… Ils se laissent pas prendre… Tu verras… Tu verras ce que je te dis… Dans huit jours ils sont là…

 

 

- J’y suis passée hier… Elle est catastrophée… Complètement effondrée… C’est épouvantable pour une mère une histoire pareille… Quand je suis arrivée elle lui écrivait… Elle passe son temps à pleurer… Et à lui écrire… Des lettres interminables… Ca la rend folle de le savoir là-bas… Elle ne pense plus qu’à ça… Elle n’en dort plus… Et elle veut savoir ce que les gens racontent… Vous le savez aussi bien que moi ce que les gens racontent… Les gens sont les gens… Et dès qu’une tuile dégringole ils préfèrent que ce soit sur le voisin que sur eux… C’est normal… On peut pas leur en vouloir… Et ils parlent les gens… Ils ne s’en privent pas… Qu’est-ce que vous voulez y faire ?…

 

 

- Tout ça - toute cette histoire - il faut que quelqu’un le dise - que quelqu’un ose le dire puisque c’est ce que tout le monde pense - ça commence vraiment à bien faire maintenant… Ca empoisonne tout ici… Tout… Et il serait grand temps, dans l’intérêt de tout le monde, qu’on en finisse une bonne fois pour toutes… Et qu’on passe à autre chose… Parce que… ils ont fait une connerie… bon, c’est vrai, ils ont fait une connerie… Personne n’a jamais dit le contraire… Moi le premier… Mais enfin c’est vrai aussi qu’il faut regarder les choses telles qu’elles sont… C’est quand même rare que tous les torts soient du même côté… Ca s’est jamais vu… Nulle part… Personne n’est jamais tout blanc… Ni tout noir… Alors qu’ils l’aient forcée on veut bien le croire puisque elle le dit… Mais enfin c’est peut-être pas aussi simple que ça en a l’air… C’est vraiment le genre de trucs où pour savoir ce qui s’est vraiment passé… Parce que je voudrais bien qu’on m’explique, que quelqu’un m’explique - si il peut - comment des gamins que tout le monde connaît depuis qu’ils sont hauts comme ça, à qui on n’a jamais rien eu de sérieux à reprocher, qui fréquentent tous - ou presque - des filles de leur âge, eh bien comment ces gamins-là ont pu, comme ça, sans raison, tous ensemble… Il faut bien qu’il y ait une explication…

 

 

- On se force un peu, les gars !… Ca manque de nerf aujourd’hui… Tu m’entends, Capelli ?… T’es pas en promenade !… Qui tu veux que j’y mette, tu peux me dire ?…Qui ?… Je peux faire remonter Fanon et rentrer Blagnier à la rigueur… Mais derrière ?… Martou ?… Ca fait six mois qu’il a pas joué… Il peut pas faire cent mètres sans cracher ses poumons… Pratier ?… Il fait plus la différence entre un ballon de rugby et un ballon de rouge… Eh ben Ricoeur !… Qu’est-ce tu fous ?… Elle a bon dos ta godasse… Grouille-toi de rattraper les autres !… Je sais pas ce qu’ils ont aujourd’hui… En tout cas on peut pas dire toute cette histoire ça nous a foutus dans une belle merde… Et on n’est pas près d’en sortir… Eux non plus d’ailleurs… Parce que je te dis pas dans quel état ils vont nous les renvoyer de là-bas… Des gamins pour te les pourrir il y a rien de tel que la taule… Ca t’en fait des délinquants - des vrais - en deux temps trois mouvements… De toute façon dès le début c’était mal emmanché tout ça… Tu veux que je t’aide, Capelli ?… Jamais ça aurait dû prendre des proportions pareilles… Jamais… Seulement les gendarmes ils avaient tout intérêt à monter ça en épingle… Ca tombait à pic pour eux après les cambriolages de Mars… Qu’ils ont pas été fichus d’en attraper un… Qu’ils s’y sont tellement bien pris qu’ils ont fait rigoler tout le monde… Et qu’ils se sont fait joyeusement souffler dans les bronches en haut lieu à ce qu’il paraît… Alors cette histoire c’était l’occasion rêvée de se rattraper à bon compte… Avec des gamins c’est sans risque… Ils peuvent jouer les Rambos tant qu’ils veulent… Et que je te gonfle tout ça tant que je peux… Et que je te torche un rapport que le juge il en a pas dormi pendant trois jours… Alors forcément… Ca va pas Capelli ?… Bon, allez, cette fois ça suffit les gars… On rentre aux vestiaires… Y en a marre…

 

 

- Oui… Oui… En troisième déjà elle courait… Et pas qu’un peu… Toutes ses copines le disent… Et cette année c’est quatre petits amis - quatre, rien que ça ! - qu’elle a trouvé moyen d’avoir à la file les uns derrière les autres… Et ça couchait !… Alors c’est pas pour les défendre, mais les garçons forcément quand ils voient ça ils se font leur petite idée… Ils se disent qu’après tout pourquoi pas eux ?… Faut les comprendre aussi… Et puis, entre nous, faut quand même reconnaître que quand on accepte de suivre une tripotée de garçons dans un hangar désaffecté on sait quand même à quoi on s’expose, non ?…

 

 

- Lamentable… Lamentable… Le pauvre gamin c’était vraiment le dernier à être taillé pour une histoire pareille !… Et c’est justement sur lui - allez savoir pourquoi ! - qu’on s’acharne tant qu’on peut… Qu’on a mis à part comme un pestiféré… Qu’on a envoyé là-bas loin de tout et de tout le monde… Qu’on a tout fait pour empêcher sa mère de le voir… Il a fallu qu’elle fasse des pieds et des mains la pauvre femme… Il manquait toujours quelque chose… un papier… une autorisation… Et quand elle y est enfin arrivée… ça a été pour le trouver dans un état !… Il s’est effondré dans ses bras… Ils ont sangloté tous les deux en chœur pendant toute la durée de la visite.. Et quand ça a été fini, qu’il a compris que c’était fini, qu’ils ont voulu le ramener dans sa cellule, il s’est débattu comme un beau diable… Il s’accrochait à tout, à la chaise, à la tablette, à la veste du gardien… Il hurlait : - Maman !… Maman !… Me laisse pas !… S’il te plaît !… Au secours !… Il a fallu qu’ils s’y mettent à trois pour l’emmener… Il lançait des coups de pied, des coups de poing, il mordait… C’était quelque chose d’épouvantable… Inutile de vous dire dans quel état elle est rentrée…

 

 

- M’en parlez pas !… Ah non, m’en parlez pas !… Trois nuits que j’en dors pas… Deux points !… Et dire que si on l’avait tentée à la main cette pénalité on serait passés… Parce qu’ils étaient complètement cuits en face… On serait rentrés comme dans du beurre… La mauvaise inspiration… Juste au moment où il fallait pas… C’est pour les gosses surtout que c’est malheureux… Ils y croyaient tellement… Et puis cette victoire ils voulaient la dédier à leurs copains là-bas, bouclés sans même pouvoir voir ça… Sans que personne sache au juste jusqu’à quand… Et quand on pense que pendant ce temps-là l’autre se pavane tranquillement en ville… On l’a jamais tant vue…  Tous les prétextes lui sont bons… Quand on occupe comme ça le devant de la scène il faut en profiter jusqu’au bout, hein ?!… Ce serait quand même trop bête… Elle a même eu le culot de se pointer à la piscine comme si de rien n’était… Avec son petit maillot qui lui moulait le minou… Mais quand ils l’ont vue les gars ils ont quand même trouvé que trop c’était trop… - Toi, tu passes pas… T’es la dernière à pouvoir mettre les pieds ici… Elle a filé sans demander son reste… Il y a des limites à tout quand même…

 

 

- Il suffirait juste qu’il la retire sa plainte, le breton, pour que tout s’arrête, pour qu’on en reste là… Mais il veut rien entendre… Une vraie tête de cochon… Pourtant on s’en est donné du mal !… D’abord Le Gallec et Minard qui sont allés le voir… Et puis Tiron avec Madame Boin… Ils ont tout essayé… Tout… Il y a rien à faire… La foufounette de sa gamine c’est sacré… A croire qu’il est le seul à pas savoir qu’elle avait déjà allègrement servi… Et que là où ils sont passés c’était un vrai boulevard… Les gamins ils peuvent bien rester à moisir en taule il en a rien à foutre… Parce que franchement maintenant ça change quoi ?… Ce qui est fait est fait… On reviendra pas en arrière… Alors à quoi ça rime cet acharnement, vous pouvez me dire ?… Parce que… ils ont fait une connerie… Bon… Ils ont fait une connerie… Même si on saura jamais ce qui s’est vraiment passé… Une connerie qui va leur coller à la peau… Pour remonter la pente ça va pas être simple pour eux maintenant, vous pouvez me croire… Et si personne leur tend la main ils en feront d’autres des conneries quand ils sortiront… A la pelle… A se demander si c’est pas ce qu’on cherche, si c’est pas ce qu’on veut… les enfoncer pour les enfoncer… jusqu’au fond… pour être bien sûrs qu’ils pourront pas sortir la tête de l’eau… Ou à se demander s’il n’y a pas du vrai finalement dans ce que les gens commencent à raconter… Que ce breton s’il est venu jusqu’ici c’était pas sans raison… Les dettes lui couraient après… Et vite… Alors cette histoire en fin de compte ça tombe plutôt bien pour lui… Il va pouvoir se refaire une santé à coups de dommages et intérêts… Des sommes énormes il réclame à ce qu’il paraît… Alors c’est sûrement pas maintenant qu’il va lâcher le morceau… D’ailleurs si ça tombe… si ça tombe… dès le début ils ont tout manigancé…

 

 

- Tiens, regarde-moi ça… V’là que ça repasse… Ca va avoir inventé quoi cette fois-ci comme prétexte ?… Non, mais vise-moi un peu comment le falzar te lui rentre dans la raie… Et après ça ira se plaindre… Ca va où ?… Ah, à la pharmacie… Non… Ca passe devant… Chez Millard… Oui, chez Millard… Ca avait oublié le pain… Ca pourra toujours se le mettre au four si la queue leu leu a pas suffi… Eh, mais c’est que ça va repasser par ici en plus… Ca nous cherche… Ca nous nargue… T’as vu comment ça regarde par en dessous, sans en avoir l’air, l’effet que ça fait ?… On va lui montrer l’effet que ça fait… Qu’est-ce tu fous là, toi ?… Tu crois qu’on le voit pas ton petit manège à passer et repasser tant que tu peux ?… Tu l’as pas assez foutu ton bordel ici ?… Ca te suffit pas les mecs en taule à cause de toi ?… C’est ça, dégage !… Et reviens pas traîner par là, sale petite pute !…

 

 

- Vous savez quoi ?… Ils sont partis…

- Qui ça ?

- L’autre breton et sa petite allumeuse… Partis comme des voleurs… Tout est fermé là-haut et c’est en vente…

- Faut croire qu’ils avaient la conscience tranquille pour filer comme ça… Bon vent en tout cas !… Des gens comme ça qu’ils restent mettre la pagaille chez eux et qu’ils viennent pas la foutre chez les autres…

Par François - Publié dans : Scènes de la vie de province
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Commentaires

Merci  de nous mettre sous le nez toutes les fragrances dont notre belle terre regorge.

Amicalement ,
Paco
commentaire n° :1 posté par : Paco le: 18/06/2007 à 08h27
Et Dieu sait s'il y en a!... On n'en finirait pas... D'où la nécessité de parler aussi d'autre chose... Amicalement...
réponse de : François le: 21/06/2007 à 07h29
brillante dame de tant d'atours. Larmes de désir.
commentaire n° :2 posté par : BELAMI le: 29/06/2007 à 17h07
Encore les doux traits de nos contemporains, quoique c'est de toutes époques ça...l'humain dans toute sa splendeur.
commentaire n° :3 posté par : Claire le: 02/10/2008 à 12h42
Malheureusement oui, c'est de toutes les époques... Il y a une faculté de l'humain à retourner toutes les situations en fonction de ce qui l'arrange, de ses préjugés ou de son intérêt... Et quand joue l'effet de groupe... Quand on peut s'appuyer sur autrui pour se conforter dans sa bassesse ou sa lâcheté... Merci de ton passage et d'avoir fait remonter ce texte... Amicalement
réponse de : Fabien le: 02/10/2008 à 17h22

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