Lundi 4 septembre 1 04 /09 /Sep 06:23

On me demande parfois si mes histoires sont réelles ou inventées... Il y a des deux... Mais, même les histoires inventées reposent, au départ, sur un fond de vérité qui a permis à l'imagination de s'élancer... Bonne journée à tous et merci de vos fréquentes visites...

 

A U     C A F E

 

 

 

Au lycée personne n’était jamais sorti avec Alicia… Personne… Jamais… Avec son visage d’ange, ses grands yeux bleu océan, ses longs cheveux noirs qui voltigeaient sur ses épaules, elle suscitait pourtant bien des convoitises et nombreux étaient ceux qui avaient voulu tenter un jour ou l’autre leur chance… En vain… Elle repoussait toutes les avances avec tant de fermeté et de détermination que même le séducteur le plus aguerri ne tardait pas à comprendre qu’il était inutile d’insister… Il n’insistait pas… On n’insistait pas… Chacun en avait définitivement pris son parti…

 

 

J’ai retrouvé Alicia en fac le jour de la rentrée… - Qu’est-ce tu fais là ?… - Ben… et toi ?… On était perdus tous les deux, déroutés par l’immensité des locaux, la multitude des étudiants, la complexité du système des options, la nouveauté des programmes et on s’est aussitôt spontanément arrimés l’un à l’autre… Ensemble en amphi… en T.P… A la bibliothèque… Au resto U… Au café… Où on passait des heures interminables à discuter encore et encore…  A se découvrir et à se raconter…

 

 

Ce n’était pas prémédité… On arpentait le Jardin des Plantes… L’un a voulu tourner à gauche, l’autre à droite… Face à face… Tout près… Les yeux dans les yeux… Et… Elle avait un goût à la fois acidulé et sucré, de feu de bois et d’algue marine… On s’est pris la main… Nos pas nous ont portés, à rythme doux, jusqu’au labyrinthe… Nos bouches s’y sont reprises… On s’est assis sur un banc, enlacés… On était bien… Si bien…

 

 

Et on a eu nos lieux à nous, pour être le plus souvent et le plus longtemps possible à nous… A nous deux… « Notre » Jardin des Plantes bien sûr… Le petit recoin de verdure au-dessus des arènes de Lutèce… Le minuscule square sous l’église Saint Vincent de Paule… Des arrière-salles de café aussi quand il pleuvait : rue Geoffroy Saint-Hilaire… boulevard de l’hôpital… rue des Belges… Tant d’autres au hasard de nos longues errances dans Paris…

 

 

 J’étais fou de désir pour elle… Quand nous nous étions longuement embrassés, pressés, serrés l’un contre l’autre, je n’y tenais plus… Je tentais une incursion dans son corsage, essayais de me faufiler sous la jupe… Elle me repoussait doucement… - Arrête… Non… Arrête… On pourrait nous voir…        - Mais il y a personne… Elle me désignait du menton et du regard les façades des immeubles tout autour ou les consommateurs qui nous tournaient le dos, accoudés au bar… - Mais il font pas attention à nous !… - Non… Non, j’te dis !…

 

 

Il s’est passé de longs mois avant que je puisse parvenir à mes fins… Ce fut par un après-midi glacial de Janvier… Après avoir longtemps marché nous avions fini par nous réfugier dans la douce chaleur d’un café de hasard… Au sous-sol deux couples de notre âge n’étaient occupés que d’eux-mêmes… Et, cette fois, elle ne m’a pas repoussé… J’ai longuement dessiné, enrobé, modelé, avec ravissement, un amour de petit sein dont la pointe a frémi et durci sous mes doigts… J’ai cheminé lentement tout au long de la cuisse… J’ai frôlé la culotte… Je m’en suis éloigné… J’y suis revenu… J’en ai pris possession… Je l’ai effleurée, caressée, parcourue… Je m’y suis introduit… Elle a fermé les yeux… Son souffle s’est fait plus court…

 

 

J’ai recommencé chaque fois que j’ai pu… Le plus souvent elle laissait mes doigts errer et se faire progressivement audacieux sans opposer la moindre résistance… Elle y prenait même un plaisir évident… Mais, sans que je puisse en déterminer la raison, il lui arrivait aussi parfois de m’interdire farouchement toute approche… Si je l’interrogeais alors à ce sujet elle se murait dans un mutisme boudeur auquel il m’était rigoureusement impossible de l’arracher…

 

 

C’est arrivé par un splendide soir de mai… L’air était d’une infinie douceur… Les martinets tournoyaient haut dans le ciel… Nous nous étions installés sur un banc, dans un square inconnu, et elle m’avait laissé être entreprenant… Mal dissimulé derrière un maigre rideau d’arbustes, tout près, un type nous observait avec une attention hagarde… Je redoutais d’autant plus qu’elle finisse par déceler sa présence qu’elle se montrait, ce soir-là, tout particulièrement réceptive à mes caresses : elle se pressait amoureusement contre moi, se tortillait lascivement sous mes doigts, haletait voluptueusement dans mon cou… Elle a même fini par oser s’aventurer, pour la première fois, dans mon pantalon où elle a exploré, pétri, malaxé, trituré avec une fougue et une ardeur que je ne lui connaissais pas… C’est finalement le gardien du square qui nous a interrompus… - On ferme !… Il faisait cliqueter furieusement ses clés dans l’allée juste derrière… - On ferme !… On a précipitamment remis de l’ordre dans notre tenue et l’inconnu, de son côté, s’est prestement éclipsé… Au regard qu’elle a jeté dans sa direction, en se levant, il m’est venu le soupçon que, depuis le début, elle le savait là…

 

Le lendemain, elle a voulu retourner au même endroit… - Il est sympa ce petit square, non ?… Et puis tranquille… On s’est installés sur le même banc, à la même place… On s’est encore embrassés, caressés… De temps à autre elle le cherchait brièvement, du coin de l’oeil, dans les feuillages… - Il viendra pas… Elle a plongé dans les miens des yeux d’un bleu angélique… - Hein ?… Mais qui ça ?… 

 

 

Il n’est revenu que la semaine suivante… Elle était sur mes genoux, la tête enfouie dans mon cou, la robe relevée haut sur les cuisses… - Il est là… Elle n’a pas bougé… Elle a imperceptiblement frémi… - Il est là… Et, tout en continuant à la caresser, j’ai lentement pivoté pour qu’elle lui fasse très exactement face… Elle ne m’en a pas empêché… - Il fait quoi ?… En chuchotement à l’oreille…       - Rien… Il te regarde… Il te mange des yeux… J’ai ramené les bords de la culotte au pli de l’aine et j’ai palpé, fouillé, écarté, introduit deux doigts… Elle a haleté dans mon cou…

 

 

Il n’est plus jamais revenu…

 

 

 

 

II

 

 

On avait échoué tous les deux lamentablement à nos examens… Ce n’était que justice : nos résultats étaient à la mesure du travail fourni… Alicia avait décidé d’arrêter… - De toute façon j’en ai marre… Ca me sort par les yeux… En septembre elle a trouvé du travail, loué un petit studio… On s’y retrouvait aussi souvent que possible… J’y passais la nuit, les week end… On était bien… On était ensemble… On faisait l’amour… Souvent… De moins en moins souvent… Presque plus… On en avait incompréhensiblement très vite perdu l’envie…

 

 

Elle l’a tranquillement constaté un dimanche d’octobre… - On s’emmerde… Et pas qu’un peu… On va faire un tour ?!… Et d’instinct on a repris nos anciens circuits… Les mêmes cafés… Les mêmes squares… Les mêmes bancs… Tout est redevenu - aussitôt - comme avant… Et on a passé  le plus clair de notre temps dehors…

 

 

L’immeuble juste en face du banc où elle m’avait entraîné comportait dix étages… Et douze fenêtres par étage… Qu’on a longuement contemplées sans rien dire… - Il y a des gens, tu crois, derrière ?… Elle n’a pas répondu… Elle a posé la tête sur mon épaule… - Il y a toujours - partout - du monde à l’affût de ce qui se passe derrière les fenêtres… Tu peux être tranquille qu’on nous a repérés… Qu’il y a des types là, tapis dans l’ombre, - Un ?… Deux ?… Cinq ?… Dix ?… Plus ?… On saura jamais - qui espèrent de toutes leurs forces que je vais finir par te prendre contre moi et par te caresser… Ils sont prêts à attendre des heures s’il le faut juste pour entrevoir la courbe de ton sein… un petit bout de culotte… beaucoup plus peut-être s’ils ont de la chance… Pour te voir te blottir passionnément contre moi… onduler… n’en plus pouvoir de désir, d’excitation, de volupté… Elle a plongé ses yeux dans les miens… Ils étaient embués… Je l’ai attirée et on leur a donné à voir… Beaucoup… Tellement…

 

 

Elle était tombée en arrêt devant un pantalon dans la vitrine d’un magasin du boulevard saint-Michel… - Il te plaît ?… Je te l’offre… Il ne lui allait pas…     - Ca me boudine… Mais il y en avait d’autres… Des quantités d’autres… - Une vraie mine, dis donc, là-dedans !… Une mine qu’elle a voulu explorer, d’essayage en essayage, de fond en comble… J’apportais… Je soulevais le rideau… Je remportais… J’apportais encore… La cabine faisait face à la caisse… Le type derrière ne pouvait pas en détacher les yeux… Au gré de mes incursions le rideau glissait insensiblement et progressivement sur la tringle, lui offrant des perspectives de plus en plus intéressantes… Elle faisait mine de ne pas s’en apercevoir… Elle enfilait, ajustait, retirait, recommençait… Un dernier pantalon, beaucoup trop étroit, dans lequel elle s’est malgré tout obstinée à rentrer en se tortillant… Dont elle a éprouvé les pires difficultés à sortir… La culotte a suivi… Elle a brusquement relevé la tête, croisé son regard, tiré le rideau… Au retour on a aussitôt fait l’amour avec infiniment de passion…

 

 

On avait choisi le cinéma devant lequel s’étirait la file d’attente la plus longue… On attendait l’ouverture du guichet… Elle observait les gens tout autour avec une attention extrême… Tout à l’heure, dans la salle, celui-ci ou celui-là serait assis juste derrière nous ou à côté… Il ne verrait rien du film, bien trop préoccupé de nous, d’elle, de nos caresses… Chaque fois que, sur l’écran, l’image se ferait plus claire il se tendrait, toute attention, pour capturer - goulûment - tout ce qu’il pourrait d’elle… - Tais-toi !… - Ils ne peuvent pas entendre… Combien ils seraient, là, à n’avoir d’yeux que pour elle ?… Et puis, le film terminé, quand la lumière reviendrait, que la salle s’évacuerait lentement - si lentement - ils auraient encore le plaisir de ses joues en feu, de son regard baissé qu’ils s’efforceraient en vain de saisir… On a pris nos billets et on s’est installés en bas dans les tout premiers rangs…

 

 

Comme tous les jours j’étais allé l’attendre, sur le trottoir, en bas de son bureau, pour passer avec elle les deux heures de sa pause déjeuner… Il pleuvait à verse et on s’est engouffrés, en toute hâte, dans le premier café venu… L’arrière-salle était comble… La seule table libre faisait face au comptoir auquel une dizaine d’hommes en bleu de travail étaient accoudés… - Oh non !… Non !… Quand même pas !… Mais elle s’y est laissé entraîner… On s’est assis côte à côte, sur la banquette, et je l’ai attirée contre moi… Elle a enfoui sa tête dans mon cou, comme à son habitude, et j’ai entrepris la lente ascension de la cuisse… J’ai voulu aller plus loin, plus haut… Elle s’est dérobée, défendue, genoux obstinément serrés, et puis abandonnée d’un seul coup… Au comptoir toutes les conversations s’étaient interrompues… - Ils regardent… Tous… Elle a haleté dans mon cou…              - Arrête !… S’il te plaît, arrête !… Dans la culotte… J’ai lissé longuement les contreforts, le pourtour, l’intérieur des lèvres… - Arrête !… Arrête !… Je vais jouir… Un peu plus fort… Un peu plus vite…  Elle s’est crispée, raidie… Un râle… un seul, mais vibrant, venu du tréfonds d’elle-même… Plein… Entier… Ils ont éclaté de rire… Et puis le patron a exigé, péremptoire… - Oui, ben vous allez faire vos cochonneries ailleurs !… C’est pas un bordel ici !… Il a fallu passer devant eux, goguenards, rigolards… Quand on est arrivés à sa hauteur celui du bout de la rangée a tranquillement constaté… - Eh ben dis donc, ma fifille, toi, faut pas t’en promettre…

 

 

Au-dehors la pluie avait encore redoublé de violence et on a précipitamment trouvé refuge sous une porte cochère… On s’y est enlacés… Le désir s’est élancé, nous a enveloppés, submergés… Et elle m’a voulu en elle… Là… Tout de suite… Il y a eu une cavalcade sur le palier juste au-dessus… La minuterie a brusquement illuminé la cage d’escalier… Quelqu’un s’y est précipité… Elle m’a retenu… Et elle a eu son plaisir juste au moment où a surgi un homme entre deux âges qui s’est figé à nos côtés, médusé…

Par François - Publié dans : regards.croises
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