Jeudi 6 novembre 4 06 /11 /Nov 05:07

Dimanche 2 Juillet 2034

 

- Et Oléron ?… Grand mère a haussé les épaules… - Oléron aussi… Pourquoi ça ferait exception Oléron ?… A marée haute tout est submergé… - Et les gens ?… - Il y a plus personne… Ils y habitent plus les gens… Comment veux-tu ?… On les a relogés… A l’intérieur des terres… Où on a pu… Comme on a pu…

 

J’y suis allée. Pour voir. Pour me rendre compte. Ce qui frappe avant tout, quand on arrive, c’est l’invraisemblable quantité de caravanes alignées côte à côte, juste en face, sur le littoral. Elles sont occupées par des îliennes qui ont refusé le logement qu’on leur proposait : elles ne peuvent pas se résoudre à s’éloigner de chez elles. C’est là qu’est leur vie. C’est là que sont leurs morts. J’ai parlé avec quelques-unes d’entre elles. Elles attendent. Elles espèrent. Quoi ?… Qu’un miracle quelconque se produise qui leur ramène avant. Qui leur rende leur île. Elles y croient. Elles font comme si. Elles se raccrochent à n’importe quelle affirmation de n’importe quelle pseudo-scientifique qui leur affirme que la situation est transitoire et que le niveau de l’Océan devrait baisser. Que c’est l’affaire de quelques mois. Au pire deux ou trois ans. Chaque fois que c’est marée basse, que l’île est « désubmergée » comme elles disent – et la partie rendue se réduit de plus en plus – elles vont là-bas. Elles errent au milieu des ruines, de leurs souvenirs disloqués. Elles n’en reviennent qu’au dernier moment. En larmes.

 

 

 

 

Mardi 4 Juillet 2034

 

J’ai évité la côte. Je suis allé me promener vers l’intérieur. Les jardins sont à l’abandon : à quoi bon cultiver quoi que ce soit puisque c’est de toute façon voué à l’échec. Les commerces se sont adaptés. Ils proposent des produits alimentaires de substitution de plus en plus variés. Ils n’ont pas eu le choix. Tout cela est profondément déprimant. On prend tout de plein fouet ici. Beaucoup plus qu’en ville. Je n’ai plus qu’une idée en tête. Rentrer. Mais il y a grand-mère… Qui se faisait une fête de m’avoir tout un mois avec elle. J’ai tâté le terrain… - Tu fais comme tu veux… Et elle s’est mise silencieusement à pleurer… Je l’ai embrassée… - Mais non !… T’inquiète pas… Je vais rester…

 

 

 

Mercredi 5 juillet 2034

 

Je suis restée. Et je m’ennuie. Mortellement. Comme quand j’étais gamine et que je ne savais pas à quoi m’occuper. Je me force à mettre le nez dehors. Et c’est insupportable ce décalage qui me saute partout à la figure – où que j’aille – entre les souvenirs lumineux que j’ai gardés et la réalité qui les a recouverts. C’est à hurler de rage. Ou de désespoir. Alors je rentre. Je vais voir s’il y a quelqu’un en ligne. Personne. Jamais. Elles, au moins elles profitent de leurs vacances. Qu’elles en profitent. Tant qu’elles peuvent. Parce que personne ne sait de quoi demain sera fait.ou plutôt si: on le sait toutes trop bien.

 

 

 

 

23 heures

 

Christopher, lui au moins je suis certaine de finir par le trouver. Il ne s’éloigne jamais beaucoup de son ordinateur. Les Vacances pour lui… - Oh, c’est pour bientôt… En septembre je les prends… Je suis entrée dans le jeu… - C’est la meilleure période… Il fait pas trop chaud… Et il y a plus personne nulle part… Et tu vas où si c’est pas indiscret ?… Où l’inspiration me mènera… De toute façon elles seront brèves les Vacances… J’ai d’autres priorités… Faut que je me trouve rapidement un logement… Parce que c’est bien beau de se faire héberger par des amies… C’est très gentil à elles de me l’avoir proposé, mais je ne veux surtout pas être importun… A moi de me débrouiller par mes propres moyens… Même si je ne me cache pas que je vais au devant de bien des difficultés… Il va me falloir rester extrêmement discret sous peine d’être repéré et renvoyé ici… J’ai ri… - Ca fait du bien, hein, de délirer un peu comme ça de temps en temps… De jouer à se faire croire que la vie va enfin reprendre son cours normalement… Que tout va redevenir comme avant… On en a tous besoin… - Mais ce n’est pas un jeu… Tout va redevenir comme avant… J’ai pris peur brusquement… Il paraissait tellement sérieux… - Mais non, Christopher, non !… Tu sais bien que ce n’est pas possible… - Qu’est-ce qui n’est pas possible ?… Tout est possible dès l’instant où on le veut vraiment… - Le virus… Tu y penses au virus ?… - Tu crois encore à ça, toi ?… Il y a belle lurette qu’on l’a éradiqué le virus… Mais c’est un secret soigneusement gardé…

Par Fabien - Publié dans : 2034
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