histoires méchantes, méchantes histoires

Lundi 7 mai 1 07 /05 /Mai 06:37

« M O N S I E U R »

 

 

Quand « Monsieur » - Mouillard en vrai, il fait chaudronnerie - quand « Monsieur » est revenu, le lundi, après ses huit jours de renvoi, toute la cour l’a applaudi… Même ceux de la Font-Basse… Même ceux des Cagnettes… Bien obligés… Parce que eux, les siens, ils regardaient de tous les côtés qui le faisait et qui le faisait pas… Ils l’avaient mis sur leurs épaules, ils rigolaient, ils tapaient dans leurs mains, ils chantaient : - On a gagné !… On a gagné !… Lui, il saluait les bras en l’air… - Merci… Merci… - Quelle bande de cons !… - Fais pas l’andouille, Laurène, ils nous regardent !… Et elle s’est mise à applaudir comme tout le monde… Quand il a vu Protêt, il a fait signe d’arrêter, qu’on le descende… Il est descendu… Il y a eu un grand silence… Ils ont tous avancé vers lui tout seul contre le mur, ils l’ont entouré… Ca s’est mis à faire comme des vagues… Il y a eu des cris, un hurlement, et tout le monde a regardé ailleurs… Les surveillants aussi…

 

 

A la cantine, le midi, « Monsieur » choisit des ravitailleurs… Il se lève tranquillement, il passe au milieu des tables, il nous regarde les uns après les autres, il fait plusieurs tours comme ça sans se presser, les mains dans le dos… Et puis il en choisit trois ou quatre tout d’un coup au hasard… - Toi !… Toi !… Toi !… Et on doit lui donner son dessert… On lui apporte, après, dans la cour, tout au fond, là où il s’installe toujours avec les siens… Il est appuyé au mur… Il se marre… Il dit… - Tiens, voilà les rois mages !… C’est gentil… Ca vous prive pas trop, les petites têtes ?… C’est vrai ?… C’est de bon cœur ?… On doit les déposer à ses pieds et il les écrase d’un coup de talon ou bien des fois - pas souvent - il les distribue aux siens…

 

 

- Toi !… - Il peut courir !… - Fais pas l’idiote, Laurène !… - Y en a marre !… Ils commencent à faire chier, vraiment chier !… Et elle a arraché le couvercle de son yaourt… - Arrête, Laurène, arrête !… - J’m’en fous !… Et elle a commencé à le manger… - T’es complètement folle !… Et elle l’a fini… - Tiens, tu lui donneras le mien… - Non !…

 

 

Quand on est sorties il ne nous a même pas regardées… Maintenant qu’elle l’avait fait, Laurène n’arrêtait pas de répéter : - Me laissez pas, les filles, hein, me laissez pas !… - Non, mais franchement, qu’est-ce qui t’a pris ?… T’es cinglée ou quoi ?… Même aux flics ils leur foutent la trouille et toi tu… - Oui, mais me laissez pas, les filles, hein, me laissez pas !… On l’a pas laissée… On n’a pas arrêté d’aller la chercher… Et de la raccompagner… Mais il ne se passait jamais rien… - Oui, mais me laissez pas quand même, hein !… Me laissez pas !… Il continuait à rien se passer… Ils s’en fichent pas mal de toi !… Et ça n’a plus été la peine de pas la laisser…

 

 

Quand c’est arrivé - un peu après - elle revenait d’Inter, Laurène… Ils étaient cinq ou six, mais pas du bahut, elle les connaissait pas… Ils l’attendaient dans un renfoncement juste au coin de la rue Guynemer… - T’as fait tes courses ?… Elle a voulu se mettre à courir, mais ils l’ont poussée contre le mur… - Hein ?… T’as fait tes courses ?… Fais voir !… Mais fais voir, quoi !… Ils ont pris son panier de force, ils l’ont renversé sur le trottoir, tout pêle-mêle… - Tous ces yaourts, dis donc !… T’adores ça, toi, les yaourts, hein !… Et ils ont rigolé…  - Tu vas vraiment manger tout ça ?… Tu vas nous faire voir alors !… Hein, les gars, elle va nous faire voir !… Ils se sont mis à trois pour la tenir et les autres l’ont forcée à ouvrir la bouche… Ils ont vidé tous les yaourts dedans, l’un après l’autre, en l’obligeant à avaler… Chaque fois qu’elle essayait de recracher ou que ça dégoulinait sur son menton ils lui flanquaient une gifle… - Mange proprement !… On t’a pas appris ?… Le douzième ils le lui ont écrasé sur la figure en appuyant de toutes leurs forces… - Ca t’apprendra à fermer ta gueule !…

 

 

Le lendemain, à la cantine, « Monsieur » ne s’est pas occupé d’elle… Ni les jours suivants… Mais le vendredi il a tourné, tourné encore et puis il s’est arrêté juste à côté de nous… - Toi !… Elle toute seule… Et elle lui a porté son orange, après, dans la cour… Il l’a fait sauter d’une main dans l’autre en rigolant et puis il l’a balancée par dessus le mur… - Fous le camp !… Toute la semaine c’est elle qu’il a choisie… - Et on n’en a pas fini tous les deux !… Sois tranquille, on n’en a pas fini…

 

 

- Vous n’avez rien remarqué ?… Tous les matins, quand on passait chercher Laurène, on en profitait  pour monter aux toilettes une dernière fois          - même sans avoir vraiment envie - parce que là-bas toutes les portes étaient défoncées et chaque fois qu’on en remettait des neuves elles étaient démolies le lendemain alors on les remplaçait plus… - Hein ?… Vous n’avez rien remarqué ?… Elle nous attendait à la porte sa mère… Elle parlait tout bas… Non… Non , on n’avait rien remarqué… Il fallait remarquer quelque chose ?… Que c’était louche… - Mais lui en parlez pas surtout… Je compte sur vous, hein !… De l’argent disparaissait… De grosses sommes… - Où ?… Si vous savez quelque chose il faut le dire…

 

 

Ben oui, c’était eux… Ils en voulaient… Tous les jours… - Mais pourquoi tu nous en as pas parlé à nous ?… - Manquerait plus que ça que je porte pas plainte !… il a dit son père…

 

 

- Soyez prudents quand même, très prudents, ils ont fait les flics… On les connaît ces oiseaux-là… On passe notre temps à les arrêter et eux - là-bas - ils passent leur temps à les relâcher… Alors… Et on pourra pas toujours être derrière vous, vous savez !…

 

 

D’abord ils ont téléphoné… Tout le temps… Le jour… La nuit… Sans rien dire… Ils appelaient, ils raccrochaient , ils rappelaient… Aussitôt… Et puis son père à son boulot… - On t’aura, ordure !… On te crèvera…

 

 

Ensuite sa mère… Chaque fois qu’elle allait quelque part elle trouvait ses pneus coupés… Ou bien ils lui jetaient des pierres… Ils lui crachaient… Un jour ils l’ont coincée avec des chariots sur le parking de l’Inter… - On te baisera, salope !…

 

 

A la rentrée de Pâques, quand on est allées chercher Laurène, ils étaient cinq - on les connaissait pas - qui attendaient en bas devant la porte… Elle voulait pas venir… - Sûrement pas !… Vous êtes pas bien ?… Sa mère pleurait sur le canapé… - J’en peux plus !… Mais pourquoi ?… Pourquoi ?… Qu’est-ce qu’ils veulent ?… Ils vont pas nous poursuivre comme ça tout le temps ?… J’en peux plus… J’en peux plus… - Mais tais-toi, maman, arrête !… Arrête, je t’en prie, arrête !… Son père marchait de long en large… - Mais qu’est-ce qu’ils foutent, bon Dieu !… Il avait appelé les flics… - Mais qu’est-ce qu’ils foutent ?…

 

 

Quand on est redescendues, ils arrivaient avec la fourgonnette… - Vous avez vos papiers ?… - Hein ?… Mais qu’est-ce qu’on a fait ?… - Vos papiers !… - C’est défendu d’être dans la rue, M’sieur ?… C’est la bonne femme de là-haut qui vous a appelés, hein ?!… Allez, circulez, vous avez rien à faire là… - Mais qu’est-ce qu’on a fait ?… Qu’est-ce qu’on a fait ?… Dites-le si on a fait quelque chose… On a le droit, M’sieur…

 

 

Au bahut « Monsieur » n’était plus là…

 

 

Quand elle les a vus arriver, à quatre heures, à la gare, - elle révisait sa géo en attendant le train - elle a tout de suite compris… Ils avançaient sans se presser en tenant toute la largeur du quai… Ils se sont arrêtés, ils l’ont regardée et ils se sont assis, un de chaque côté… Les trois autres sont restés debout devant elle… Tout près… A la toucher… - On te dérange pas ?… C’est vrai, on te dérange pas ?… Faut le dire, hein !… Vous voyez, les gars, on la dérange pas… Nous, on demande, tu vois, on est corrects… Pas comme ta copine Laurène… C’est bien ta copine ?… Mais si, celle des yaourts… C’est bien ta copine ?… T’as pas l’air sûre, là… C’est ta copine ou c’est pas ta copine ?… Oui ?… Tu devrais faire gaffe, tu vois, - nous, on te le dit comme on le pense - elle va finir par te faire avoir des tas d’ennuis... Graves… Parce que nous - c’est normal - on n’aime pas que nos potes ils aient des emmerdes… Tu comprends ?… Oui, tu comprends, t’as l’air intelligente… T’as quoi dans ton sac ?… Fais voir !… Non, mais fais voir, quoi !… T’en as des bouquins, dis donc !… Tu les lis vraiment ?… C’est vrai ?… Et ça te sert à quoi ?… Elle est bien ta calculatrice, dis donc, drôlement bien !… Et tous ces boutons qu’elle a !… Tu sais vraiment t’en servir ?… J’ai jamais eu ça, moi, quand j’étais petit… Et vous, les mecs ?… A quoi il sert, celui-là ?… Ah, tu vois, tu sais pas… Quoi, les statiques ?… C’est quoi ça les statiques ?… Vous connaissez, vous, les mecs ?… Statiques… Statistiques… C’est pareil… Tu joues sur les mots, là… Tu veux nous rabaisser, c’est ça ?… Nous donner la honte ?… Oh, t’as vu, elle est tombée… Je l’ai pas fait exprès… C’est con, hein ?… C’est vraiment con… Et lui qu’a marché dessus !… Il l’a pas fait exprès non plus… Elle est foutue… Complètement foutue… Ca fait rien, hein ?… Dis-le que ça fait rien… - Ca fait rien…

 

 

- Allo… Emilie ?… Allo… C’est Vanessa… Oui… Laurène est partie…   - Comment ça partie ?… - Partie, oui !… Avec ses parents et tout… Ils ont déménagé… Elle m’a appelée vite fait… Elle a dit qu’elle rappellerait, qu’elle pouvait pas parler, qu’il s’était encore passé plein de trucs…

 

 

Au bahut c’est « Le duc » qui a remplacé « Monsieur »… Pour tout… - On n’a pas gagné au change, dis donc !… Il l’a choisie presque tout de suite… - Toi !… Il l’a choisie tous les jours… Toujours elle… Et des types se sont mis à la suivre… Partout… Deux types… Jamais les mêmes… Tout le temps… Deux types… Toujours là… En sortant… En rentrant… Deux types… Sans rien faire… Seulement : - Elle est où Laurène ?… Hein ?… Elle est où Laurène ?… Sans arrêt... - Elle est où Laurène ?

 

 

- A Bayonne, dit Vanessa… Elle est à Bayonne…Je l’ai encore eue au téléphone… Hou la la !… Pourvu qu’ils le sachent pas…

 

 

- Où elle est Laurène ?… Hein ?… Elle est où Laurène ?

 

 

- Non… Non, moi ils me demandent rien… Ils me suivent pas… Heureusement… J’en crèverais de trouille… Qu’est-ce que tu leur dis ?

 

 

- Elle est où Laurène ?… Hein ?… Elle est où Laurène ?

 

 

 

 

 

 

 

 

« Le duc » l’a fait reculer contre le mur quand elle lui a apporté son dessert… - Elle est où Laurène ?… Il a posé une main de chaque côté de sa tête, tout près, bras tendus… - Elle est où Laurène ?… Il a approché sa figure presque à la toucher… - Hein ?… Elle est où ?… Elle a détourné la tête… - Regarde-moi !… J’ai dit : regarde-moi !…Tu le diras… Je te jure que tu finiras par le dire…

 

 

Elle est où Laurène ?… Et elle se réveillait en sursaut… Elle est où Laurène ?… Partout… Elle est où Laurène ?… Vingt fois… Elle est où Laurène ?… Trente fois… Elle est où Laurène ?… - Tu l’as pas dit au moins ?

 

 

- «  Monsieur » veut te voir !… Ils l’attendaient au portail, à la sortie… Ils étaient cinq…  - « Monsieur » veut te voir… Tu nous suis… Ils ont marché de chaque côté, elle au milieu… Toute l’avenue du général Leclerc… Et puis la rue Anatole France… Ils ont longé la mairie, sont entrés dans le jardin, ont contourné les petits bosquets vert sombre… Ils se sont arrêtés devant l’entrée du côté des hommes… - Passe !

 

 

« Monsieur » était en bas… - Tiens, tiens, quelle bonne surprise !… Toi dans un endroit pareil !… On t’y voyait jamais là-bas avec tes copines… C’était à cause de nous ?… On vous dégoûtait ?… Tu sais que ta copine elle m’a fait avoir de gros gros ennuis ?… Méchants… Elle me le paiera, ça c’est normal… Toute peine mérite salaire… Non ?… T’es pas de mon avis ?… Toi non plus t’es pas toujours correcte d’ailleurs… On te pose une question… Poliment… Gentiment… Jamais un mot plus haut que l’autre… Jamais rien… Et toi tu connais la réponse et tu veux rien dire… Tu trouves ça bien ?… Toi aussi faudra que tu paies… Faut une justice… De toute façon tout finit toujours par se savoir… Même que t’aies rien voulu dire… Et tu vois à Bayonne aussi on a des potes à nous… On en a partout… Ca va être sa fête à ta copine… Tu peux être sûre que ça va être sa fête… Elle va s’en souvenir… Mais tu vois un truc qui serait vraiment con pour toi c’est si on lui disait que c’est toi qui nous l’as dit… On pourrait… Avec tout plein de détails… On le fera sûrement d’ailleurs… Qu’est-ce qui t’arrive ?… Qu’est-ce que t’as à te dandiner comme ça ?… T’as envie, c’est ça ?… Eh ben vas-y !… Ca tombe bien : c’est justement l’endroit pour ça… Tout est prévu… Mais tu vois, ça dépend de toi maintenant pour ta copine ce qui va lui arriver… Et que de toi… Tu m’écoutes pas là, je le sens… Tu m’écoutes pas… Tu penses qu’à te retenir… Vas-y une bonne fois pour toutes et puis qu’on n’en parle plus… Attends, on va t’aider… Aidez-la, les gars !… Non ?… Tu préfères toute seule ?… Comme tu veux… Oui, ça dépend de toi pour ta copine… Complètement de toi… Plus bas la culotte… Autrement tu vas pisser dedans… C’est pas propre, tu sais !… Descends-la carrément !… Là, tu vois, c’est mieux… C’est pas pratique ces trucs à la turque, hein ?… Non, parce que quelqu’un comme toi personne se méfie… Logique… Et nous, on a besoin… Pour des trucs, des renseignements… On t’expliquera… Eh ben dis donc t’avais vraiment envie ! Hou la la !… Une vraie fontaine !… Là, ça y est ?… On se sent mieux, hein ?… Alors tu vois, si tu fais ce qu’on te dit - et seulement ce qu’on te dit - on l’oublie ta copine… Gommée… Disparue… Autrement ce sera dur pour elle… Très très dur… T’as pas idée… Pour toi aussi d’ailleurs… T’imagines même pas !… Ben qu’est-ce tu fais, là ?… Hein ?… La culotte !… Personne t’a dit de la remettre la culotte !… Oui, on l’oublie Laurène… Et toi, il peut plus rien t’arriver… Si quelqu’un te touche c’est nous qu’il touche… Tu comprends ?… On marche comme ça ?… Oui ?… Tu peux la remettre… Ta culotte !… Tu peux la remettre… Qu’est-ce qu’on dit ?… - Merci… Merci qui ?… - Merci Monsieur…

Par François - Publié dans : histoires méchantes, méchantes histoires
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Jeudi 3 mai 4 03 /05 /Mai 07:58

U N     M E U R T R E     T R E S     O R DI N A I R E

 

 

 

- Ton fric, la vieille !… Allez, ton fric !… Tu te grouilles ou on te défonce ta lourde !… Ton fric !… T’as compris, oui ?…

 

 

- Vous avez entendu ça cette nuit ?… Hein ?… Vous avez entendu ?… Si c’est pas malheureux !… Ca a pas arrêté… J’en ai pas fermé l’œil… Et elle !… Que ça a toujours été sa terreur, ça, qu’on vienne la dévaliser la nuit… Elle qui se verrouille tant et plus… Un drôle de quart d’heure elle a dû passer… Oui… Un drôle de quart d’heure…

 

 

- Oh, c’est nous, la vieille !… C’est nous !… Tu dors ?… Ben ça va pas durer !… Allez, debout là-dedans !… Debout ou on rentre te tirer par les pieds…

 

 

- Il faut quand même reconnaître… Elle est pas toute blanche non plus, hein !… Elle y met pas beaucoup du sien… A force de faire tout ce qu’elle peut pour pas être comme tout le monde… Ca n’arrive quand même pas à n’importe qui ce genre de choses… Ni à vous ni à moi en tout cas… Ca, non, c’est pas à nous que ça arriverait… Mais on l’avait pas soignée pour la tête un moment ?

 

 

- Alors, la vieille ?!… Comment tu dors ?… A poil ?… Fais-nous voir ça… Qu’on rigole…

 

 

- Non, cette fois, ça devient infernal cette histoire… Ca peut plus durer… C’est tout le quartier qui va devenir invivable si ça continue… On en parlait justement encore tout à l’heure avec la Juliette Beaugrand… Non… Il faut faire quelque chose… Elle, en tout cas, ça a pas l’air de la tracasser plus que ça… On la guettait quand elle est descendue chercher son courrier… Elle vous dit bonjour comme si de rien n’était… Comme si elle n’avait rien entendu… Ca aussi ça les énerve… Ca les excite… Ca énerve tout le monde ces espèces d’air… Comme si elle était au-dessus de tout et de tout le monde… A croire qu’elle le fait exprès… qu’elle prend un malin plaisir à faire tout ce qu’elle peut pour que ça continue…

 

 

- Oh, vieille conne, tu vas répondre, oui ?!… T’es sourde ?… C’est quoi qui t’a rendue sourde ?… Tu t’es trop tripotée, c’est ça ?

 

 

- Enfin !… Enfin !… Eh ben c’est pas trop tôt qu’elle se soit décidée… depuis le temps… A deux gendarmes qu’ils sont montés… Avec la fourgonnette… Et la machine à écrire… Plus d’une heure qu’ils y sont restés… J’ai bien cru qu’ils allaient coucher là… Et c’est tout droit chez moi qu’ils sont venus après quand ils sont sortis… Oh, mais moi, les gendarmes, pas folle, hein !… Je tiens pas du tout à ce que ça se retourne contre moi… On sait ce que c’est, les gendarmes… Moins on leur en dit et mieux on se porte… Rien, non, oh, rien, je leur ai fait, j’ai rien entendu… Oui, oui, oui, bien sûr il y a des gamins qui passent comme ça de temps en temps en braillant… Mais allez savoir quoi au juste !… A cet âge-là, vous savez !… Les gamins, c’est des gamins… Moi, en tout cas, j’ai suffisamment à faire sans m’occuper de ça… J’y ai jamais vraiment fait attention… Non… Jamais…

 

 

- Oh, la vieille, c’est pas beau de cafter… Tu vas nous payer ça… - Bande de petits voyous, vous allez voir… - C’est tout vu, la vieille… Mets-toi à la fenêtre : on jouera aux fléchettes…

 

 

- Et voilà !… Ca recommence… Vous avez entendu ça ?… C’est même encore pire qu’avant… On se demande vraiment à quoi ça lui a servi de faire tout ce remue-ménage… Avec les gendarmes et tout… Elle aurait bien mieux fait de se tenir tranquille… Oui… bien mieux fait… Ils auraient fini par se calmer à la longue… Forcément… Tandis que maintenant… En tout cas ça peut plus durer… Non, ça peut plus durer… On a droit à notre tranquillité, nous, quand même !… Comme j’ai dit à ce bon monsieur Dubois vous devriez vous en charger, vous !… Ca aurait beaucoup plus de poids… Et puis avec votre femme malade… Si elle peut même plus se reposer en paix, la pauvre !…

 

 

- Oh, la vieille, c’est où qu’elle fait la pute déjà ta fille ?… Tu nous donneras l’adresse… Qu’on aille y faire un tour…

 

 

- Je lui ai dit : - Monsieur Dubois, c’est une très bonne idée - une très très bonne idée - la pétition pour l’obliger à s’en aller… Nuisance de voisinage il a mis… Il a tout marqué : les odeurs qui viennent de chez elle avec les chats et les poubelles que c’en est une infection l’été… Son chauffe-eau qui finira bien par faire sauter tout le quartier un jour… Et puis l’histoire des boîtes aux lettres qu’il faut bien dire que c’est resté en travers de la gorge à tout le monde… Tout il a mis… Tout… Et comme je lui ai dit : je suis avec vous, Monsieur Dubois, avec vous tous, mais je peux pas signer… Vous comprenez… Avec mon fils à l’usine et ma fille à la banque on sait jamais… Faudrait pas qu’après, hein ?!… Il a très bien compris… Très très bien… Vous faites comme vous voulez, Madame Delpierre, vous faites comme vous voulez… Ca prendra du temps il a ajouté… Ca prendra forcément du temps, mais il faudra bien qu’on finisse par la faire partir…

 

 

- Ca m’a fait un choc, mais un choc, vous pouvez pas savoir !… De voir les pompiers là - j’étais dans ma cuisine - et puis les gendarmes… Et personne pour dire ce qui se passait au juste… C’est quand le lieutenant est enfin descendu qu’on a su qu’elle s’était suicidée… - Et c’est fini… Il y a plus rien à faire… Suicidée… Ben ça… Ca m’a fait un choc !… Et sans un mot d’explication… Rien… Mais elle avait déjà fait une tentative quand on la soignait là-bas… On l’avait sauvée de justesse, mais vraiment de justesse… Ca l’a reprise… Avec ces maladies-là vous savez !… Surtout qu’elle s’obstinait à voir Dupré… Gardant, lui, il l’aurait sûrement sauvée… Mais Dupré !…

 

 

- On a décidé - si vous voulez participer aussi - on a décidé de faire quelque chose tous ensemble… le quartier… Laissez, j’ai dit, laissez, Monsieur Dubois, je vais m’en occuper… Qu’elle ait quelque chose de bien, mais de vraiment bien… Pas une couronne qui sera fanée dans huit jours, non, mais quelque chose qui dure… Qui restera… C’est vrai, elle a pas eu toujours la vie bien rose la pauvre femme… C’est la moindre des choses…

 

 

Par François - Publié dans : histoires méchantes, méchantes histoires
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Lundi 30 avril 1 30 /04 /Avr 10:18

L E S     R O S E S     R O U G E S

 

 

 

Alicia a ouvert de grands yeux stupéfaits… - T’attends quelqu’un ?… Mais je croyais qu’Alexandre… - Il est chez ses parents dans la Nièvre, oui !… et Mathieu à Paris… J’attends quelqu’un d’autre… - J’y crois pas… non… mais alors là j’y crois pas… Tu es… - Complètement folle… Je sais… Tu me l’as déjà dit… - C’est qui ?… - Benjamin… - Benjamin !… Je te comprendrai jamais… - Il y a rien à comprendre… Je me prends pas la tête, c’est tout !… Alexandre, c’est Alexandre… Je peux pas me passer de lui… On se connaît tellement tous les deux depuis le temps… Par cœur… On sait exactement comment on fonctionne… Dès qu’il y a un truc qui va pas je sais que je peux compter sur lui… qu’il sera là… Jamais je pourrai le quitter Alexandre… jamais… ça, c’est sûr… Mathieu non plus d’ailleurs… Un mec amoureux de toi comme ça comment t’hallucines, attends !… Tout ce que je veux j’en fais… Et ses yeux quand il me regarde… T’es obligée de craquer… Obligée… - Faudra quand même bien que tu finisses par choisir… - Ben pourquoi ?… - Le jour où ils vont se rendre compte que…       - Oui, oh ça !… Si tu sais te débrouiller… - Benjamin aussi tu vas le garder ?…     - J’en sais rien… Ca fait même pas un mois Benjamin… Mais je te prends un de ces pieds avec lui… Jamais j’aurais cru que ça existe un truc pareil… Increvable il est en plus !… Il devrait pas tarder d’ailleurs… - Oui… J’te laisse… J’te laisse…

 

 

Une rose rouge… tendue tout sourire à bout de bras… Ses lèvres…           - Viens !… Blottie contre lui sur le canapé du salon… - Tu restes, hein !?… T’as le temps ?… - Toute la nuit… Ses lèvres encore… - Je suis bien avec toi… Tellement bien… Il lui a caressé la joue, les cheveux, le cou… A petites touches tendres, délicates… Envie de ronronner doucement de bien-être… Il a lissé la peau sous la bretelle de soutien-gorge, découvert un sein… Il en a emprisonné la pointe entre deux doigts… Doux… Si doux et… - Je t’aime, Benjamin… Je t’aime tellement… Si tu savais !… Un long coup de sonnette… - Qu’est-ce que c’est que ça ?… A cette heure-ci ?… On laisse courir… Ca va partir… Ca a insisté… Encore plus long… Plus appuyé… - Tu devrais peut-être aller voir ?!… On sait jamais… Et puis à petits coups pressés, répétés… - C’est qui cet emmerdeur ?… Juste le temps de le virer et… 

 

 

- Mais… mais qu’est-ce que tu fais là, toi ?… T’es pas à Paris ?… Mathieu !… Mathieu… Avec une rose rouge lui aussi… Mathieu repoussé dehors sur le palier… - Ecoute, Mathieu… Sois gentil… - Tu m’embrasses pas ?… Du bout des lèvres… - Ecoute… - Mais qu’est-ce qui se passe ?… Ca te fait pas plaisir de me voir ?… - Si !… Bien sûr que si !… Mais va-t-en, Mathieu, je t’en supplie… Va-t-en !… Je t’expliquerai tout… Demain… - Ah oui… Je vois… T’es avec un mec, c’est ça ?!… - Mais non !… Qu’est-ce que tu vas chercher ?… C’est Alicia… Elle est mal… très très mal… Il lui est arrivé un de ces trucs !… Je te raconterai… Elle a besoin qu’on parle toutes les deux, qu’on… - Alicia ?!… Je vais juste lui dire un petit bonjour alors… et puis je me sauve… Il est passé… Elle n’a pas pu le retenir… - Eh ben alors Alicia qu’est-ce qui ?… Ah non, tiens, c’est pas Alicia…

 

 

- Tu devrais aller mettre les fleurs dans l’eau… Elles vont s’abîmer… - Ah oui… Oui… Machinalement dans le même vase… A côté ils bavardaient tranquillement… Il y avait même des rires… Elle s’est pris la tête entre les mains… Ne pas pleurer… Surtout ne pas pleurer… - Eh bien qu’est-ce tu fais ?… Viens avec nous !… Avec eux… Entre eux… Sur le canapé… Benjamin a passé un bras autour de ses épaules… - Excuse-moi, vieux, mais c’était ma soirée… T’auras d’autres occasions… Il a cherché ses lèvres… Elle s’est dérobée… - Tu m’aimes plus ?… Si ?!… Pourquoi tu le dis pas alors ?… Tu le dis tout le temps d’habitude… T’arrêtais pas de le dire tout à l’heure… Il a glissé une main sous son tee shirt, a voulu enrober un sein… - Laisse-moi !… Elle s’est levée, reculée contre le mur… - Laisse-moi !… On a encore sonné… Léger… Discret…

 

 

C’était Alexandre… Alexandre lui aussi une rose rouge à la main… Elle l’a laissé passer sans un mot… - Bon, ben voilà !… On est tous là… - Ca, c’est pas sûr !… Il y en a peut-être d’autres… Elle a fait signe que non… Non… Farouchement… De la tête… Non… - Non… Tu es sûre ?… Bon… Eh bien il te reste plus qu’à choisir alors !… Lequel tu gardes ?… De nous trois lequel tu gardes ?… Vas-y !… On t’écoute… Elle a relevé la tête, les a longuement regardés l’un après l’autre, l’a secouée… - Je peux pas… - Il va bien falloir pourtant !… Attends, on va t’aider… Qui tu supprimes d’abord ?… Mathieu ?…   - Ah non, non, pas Mathieu… - Bon… Pas Mathieu… Benjamin alors !… Non plus ?!… Il reste plus que moi du coup… - Pas toi, Alexandre !… Pas toi !…        - Moi non plus… Tu nous gardes tous les trois alors ?!… T’as bien raison… Comme ça on s’amusera tous les quatre ensemble… C’est pas plus mal pour toi finalement !… Gourmande comme tu es… Trois queues à la fois tu vas te prendre un de ces pieds, tu vas voir !… Ils se sont rapprochés et il y a eu leurs mains sur elle… Toutes leurs mains… - Non !… Elle s’est redressée, relevée… - Non !…

 

 

- Non ?… Il y a jamais rien qui te va à toi, dis donc !… Il faut pourtant bien trouver une solution !… Qu’est-ce tu proposes ?… Rien… Elle propose rien… - Et si on la tirait au sort ?… Ou qu’on la joue aux cartes ?… Au poker par exemple… - T’as des cartes ?… Elle avait, oui !… - Et du whisky… Faut toujours du whisky au poker… Et ils ont joué, enveloppés de fumée, sans plus se préoccuper d’elle…

 

 

Benjamin a abattu son jeu… - Carré… C’est fait… J’ai gagné… Il l’a prise contre lui… - T’es contente ?… Non !… T’as pas vraiment l’air… Oh, mais je veux pas m’imposer, moi, hein!… Il y en a d’autres des filles… Plein d’autres… C’est pas ça qui manque… Et il a dévalé l’escalier en sifflotant…

 

 

- Alors ?… Qu’est-ce qu’on fait ?… Mathieu a haussé les épaules…          - Alors… ben alors je te la laisse… - Ah non, non !… Il y a pas de raison que tu te sacrifies… Garde-la… - Je voudrais pas te priver… - Mais tu me prives pas !… J’en ai fait largement le tour, tu sais, depuis le temps… Non… Je te la laisse… Il s’est levé… Il s’est dirigé vers la porte… - Mais j’en veux pas !… Attends !… Attends !… Il y a eu leurs voix jusqu’en bas… Ils ne sont pas remontés… Ni l’un ni l’autre…

Par François - Publié dans : histoires méchantes, méchantes histoires
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Jeudi 26 avril 4 26 /04 /Avr 06:50

L E     J O U E T

 

 

 

- C’est toi qui choisis, Benoît… Ce sont tes sous…

C’est le plus beau… Rouge… Tout rouge… Avec un peu de doré sur le dessus… Sur les côtés aussi… Il approche la main, il touche, il soulève… Il va le serrer dans ses bras…

- Regarde, Benoît, regarde celui-là là-bas… le grand… le jaune… Tu as vu comme il est joli ?…

Non… C’est le rouge… Tout rouge… Avec du doré…

- Mais enfin, tu ne l’as même pas regardé, Benoît… On ne choisit pas comme ça sans regarder… C’est ridicule… Tiens, et celui-là ?…

Elle soulève le bleu, le fait tourner, l’incline dans la lumière…

- Regarde !… Regarde comme il est beau… Bien plus beau que ce vilain rouge… On le prend ?… Hein ?… D’accord ?…

Il tient le rouge serré très fort contre lui…

- Non, Benoît, non… Maman n’est pas d’accord… Pas d’accord pour que tu choisisses n’importe quoi comme ça sans réfléchir… Ca va finir au fond d’un placard… Comme d’habitude… Maman ne veut pas que tu gaspilles ton argent… Alors ou bien tu en choisis un beau ou bien tu n’auras rien du tout… Donne !…

Il donne… Elle le remet au milieu des autres…

- Alors ?… Lequel tu veux ?… On va pas rester là tout l’après-midi…

Rien… Il ne veut rien… C’est pas la peine… Rien du tout…

- Ne fais pas la mauvaise tête, Benoît… Tu sais très bien que maman a horreur de ça… Horreur… Alors ?… Lequel ?… Mais réponds au moins !… C’est agaçant à la fin !… Tu ne sais pas… Tu ne sais pas… Ce n’est quand même pas moi qui vais choisir à ta place…

Il lève la main… Il pointe le doigt… Le jaune… Non… Le bleu… Non… Le jaune… Oui…

- Le jaune ?… Tu es sûr, Benoît ?… Tu as bien réfléchi ?… Tu vas pas me dire en rentrant que c’était le bleu que tu voulais ?…

Non… Le jaune… Le jaune… Oui… Oui…

- Eh ben dis donc !… Ca n’a pas été sans mal… Mon pauvre Benoît… Il t’en faut un temps pour te décider…

Par François - Publié dans : histoires méchantes, méchantes histoires
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Jeudi 29 mars 4 29 /03 /Mars 05:56

A U     S U I V A N T !

 

 

 

- Au suivant!… Au suivant!… La petite lumière verte s’allumait et, chaque fois, on reprenait tous en chœur la chanson de Jacques Brel… - Au suivant !… Au suivant !… C’était la traditionnelle visite médicale, celle de l’indispensable tampon sur la carte d’étudiant… - Au suivant !… Au suivant !… Quand mon tour est arrivé on rigolait tous tellement que je ne l’ai pas vue tout de suite la petite lumière verte… Qui s’est mise à clignoter furieusement…

 

 

- Tu crois que j’ai que ça à foutre d’attendre ?… - Oui, oh, ça va !… On n’est pas à dix secondes près… - Moi, si !… Elle m’a regardé approcher, en slip… - Bon… Sujet maigre, mais musclé… Elle n’était guère plus âgée que moi… Sûrement pas une toubib, non… Plutôt une étudiante en fin d’études à qui on imposait cette inutile corvée…

 

 

- Allonge-toi là !… Redresse-toi !… Respire à fond !… Par la bouche… Tousse !… Tu fumes ?… Ben oui… Oui… Je fumais, oui… - Beaucoup ?… Sur un tel ton de mépris hautain que : - Trois paquets par jour… Et je me saoûle la gueule… Elle n’a pas relevé… Elle s’est contenté de hausser les épaules… - Assieds-toi !… Ouvre la bouche !… Tu fais quoi comme études ?… - Lettres… - Tu sais peut-être lire un annuaire alors ?!… A dentistes tu cherches… Chirurgiens-dentistes… Et tu prends rendez-vous… Tu sauras faire ?… Quelle conne !… Non, mais quelle conne !… J’ai désespérément cherché, en catastrophe, une réplique cinglante… Je n’ai trouvé qu’un pitoyable : - Faut que j’apprenne à lire alors !…

 

 

- Tu peux descendre… Elle est retournée à son bureau et s’est silencieusement absorbée dans l’étude de mon dossier… - Et évidemment question vaccins – tétanos, polyo – t’es pas à jour… Ca remonte à quand le dernier rappel ?… - Putain !… Mais vous emmerdez tout le monde comme ça ou c’est un traitement qui m’est spécialement réservé ?… - Je fais mon boulot, c’est tout… Et si ça te convient pas ça m’est complètement égal… Pas de maladies vénériennes ?… Jamais ?… Pas de troubles urinaires ?… Approche !… Elle a tiré sur mon slip, enserré, pressé, décalotté sèchement… Non, ça va… T’es pas trop complexé au moins ?… - Hein ?… Non… Pourquoi ?… - Ca aurait pu… Parce que il y en a des petites, mais alors à ce point-là… Elle a lâché… Ca a claqué contre le ventre… - Je t’aurais dirigé vers un psy, mais tant mieux, tant mieux… Et elle m’a congédié du revers de la main…  

Par François - Publié dans : histoires méchantes, méchantes histoires
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