2034

Dimanche 2 novembre 7 02 /11 /Nov 20:25

Jeudi 29 Juin 2034

 

Dès qu’elle m’a aperçue elle s’est agenouillée. D’elle-même. Sans que je lui demande quoi que ce soit. Je l’ai superbement ignorée. Une fille est entrée qui lui a lancé un regard stupéfait. Une autre. Qui s’est figée sur place. Elles sont sorties toutes les deux l’une derrière l’autre, ont bruyamment éclaté de rire dans le couloir. Devant la glace j’ai pris tout mon temps. Beaucoup plus encore que d’habitude. Je me suis lentement retournée. Je me suis approchée. Elle a fermé les yeux dans l’attente des gifles. Qui ne sont pas venues. Je l’ai brusquement empoignée par la tignasse et je lui ai enfoui la tête sous ma robe. Elle a hésité un long moment et puis elle a timidement posé ses lèvres sur ma culotte, m’a lissée de la langue à travers, a voulu passer dessous. Je l’ai violemment repoussée du bout du pied… - On t’a demandé quelque chose ?… Elle est tombée à la renverse… - La prochaine fois tu attendras qu’on te sonne…

 

Les yeux d’Iliona brillaient… - Et après ?… Qu’est-ce que t’as fait après ?… Tu l’as giflée ?… - Non… Je me suis tirée… - C’était peut-être la dernière fois… Elle repiquera peut-être pas l’année prochaine… - Oh, alors ça je suis bien tranquille que si… D’une façon ou d’une autre elle se débrouillera pour revenir… Elle est bien trop accro… - Et toi , tu vas faire quoi ?… Tu vas continuer ?… - J’en sais rien… Souvent je me dis que non… Que ça n’a pas de sens… Que je suis plus une gamine pour me conduire comme ça… Mais dès que je l’ai, là, à baver devant moi, prête à tout encaisser – tout et n’importe quoi – pourvu que ça vienne de moi, je peux pas m’empêcher… J’ai envie de pousser plus loin… Pour voir jusqu’où je peux aller… Même si je le sais déjà… - Pour te faire plaisir plutôt, non ?… A moi tu peux bien le dire… Je n’ai pas répondu.

 

 

 

 

Vendredi 30 Juin 2034

 

Il y a des moments où ça ne peut pas ne pas sauter à la figure. L’an dernier, quand j’ai pris ce même train pour La Rochelle, il y avait tout un groupe de jeunes – garçons et filles – qui riaient et plaisantaient, heureux de vivre, de partir en vacances ensemble. Je les regardais, insouciants et gais. Je leur souriais, confiante, pleine de projets d’avenir. Comme eux. Aujourd’hui la plupart des garçons sont morts. Les rares survivants – s’il y en a – sont enfermés pour des années. Peut-être à vie. Quant aux filles… si je regarde autour de moi, là, qu’est-ce que je vois ? De l’autre côté de l’allée, juste en face, il y en a une qui pleure toutes les larmes de son corps, la joue contre la vitre. Personne ne s’occupe d’elle, ne se soucie d’elle. Les réserves de compassion sont épuisées. Derrière il y en a deux qui se font face. Elles sont manifestement en couple. Elles n’ont pas échangé trois mots depuis une heure qu’on est partis. Il y a plusieurs femmes accompagnées de gamines. C’est hallucinant. Parce que il y en a aucune – absolument aucune – qui joue. Elles sont simplement assises, le regard vide, amorphes, sans manifester le moindre intérêt pour quoi que ce soit. Et c’est à proprement parler terrifiant. Sans doute partent-elles en vacances. Il est facile d’imaginer ce que seront leurs vacances. Et leur vie. Toute leur vie.

 

 

 

 

15 heures

 

Grand mère m’attendait comme le Messie. Elle avait mis les petits plats dans les grands. Avec les moyens du bord. C’est-à-dire des substituts. Des substituts de ci. Des substituts de ça. C’était poignant de voir quels trésors d’ingéniosité elle avait dépensés pour que tout ait l’air d’être le plus possible exactement comme avant. Pour moi. Pour que je retrouve un peu le goût de mes vraies vacances. Parce que elle, elle est ailleurs. Ou plutôt elle n’est nulle part. Ce n’est pas qu’elle déraille. Non. Au contraire. Elle a toute sa tête. Elle est même beaucoup plus lucide qu’elle l’a jamais été. Et que bien des femmes que je connais. Non. Mais elle n’est plus là. Son monde n’existe plus. Le nôtre n’existe pas. Alors elle reste en suspens. Dans l’attente de quelque chose à quoi se raccrocher momentanément. Pour le moment c’est moi.

 

 

 

 

22 heures

 

Je me suis forcée à aller jusqu’à La Rochelle même. Je savais à quoi m’attendre : il y a eu suffisamment de reportages ces derniers mois . Ca ne m’a pas empêchée d’accuser violemment le coup. C’est terrifiant. Terrifiant et sinistre. On fait monter les touristes dans des embarcations – je me suis jointe à eux – qui errent dans ce qui était, il n’y a pas si longtemps, des rues animées et prospères. Tout est désert. Désert et inondé. Abandonné. Et ce silence… Insupportable ce silence… A la sortie on vend des cartes postales d’avant. Sans commentaires.  

Par Fabien - Publié dans : 2034
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Jeudi 30 octobre 4 30 /10 /Oct 07:26

Samedi 24 Juin 2034

 

Je voulais aller passer ce dernier week end avant les Vacances quelque part avec Valentine. Elle, elle tenait absolument à ce que j’aille « là-bas », chez Sérane… - Je ne veux pas que tu te prives de quoi que ce soit pour moi… Et, finalement, ce n’est ni l’un ni l’autre… On est confinées ici avec interdiction formelle de sortir avant lundi matin. Couvre-feu général. Le prétexte invoqué est une tentative d’extermination définitive du virus. On aurait mis au point un produit redoutablement efficace auquel il serait incapable de résister. Seulement on ignore quels sont ses effets sur l’homme. En principe nuls. Mais on préfère appliquer le principe de précaution et ne nous laisser sortir que lorsqu’il aura agi et qu’il se sera dissipé…

 

Mais Internet bruisse des rumeurs les plus folles. On se demande en particulier pourquoi, s’il ne s’agissait que d’une opération de « nettoyage », on a attendu hier midi pour nous intimer l’ordre de rester tout le week end calfeutrées chez nous. Alors qu’une telle opération doit nécessairement être préparée – et donc prévue – longtemps à l’avance. Et il se dit qu’en réalité il s’agit de lutter, avec les moyens du bord et en catastrophe, contre une bactérie d’apparition toute récente qui risque, si elle prolifère, de faire d’épouvantables ravages. On parle même d’extinction de l’espèce humaine. Carrément. Chacun y va de son petit couplet : pour les uns on aurait laissé se répandre, par inadvertance, un gaz extrêmement toxique ( qui ne s’introduirait pas dans les maisons ? ) . Pour d’autres une attaque aérienne serait imminente ( venant d’où ? Pour quelle raison ? Et pourquoi alors ne nous a-t-on pas plutôt recommandé de nous terrer dans les caves ? ). Pour d’autres encore un coup d’Etat serait sur le point d’éclater et on aurait trouvé ce judicieux prétexte pour nous empêcher de nous en mêler. En tout cas une chose est sûre, c’est qu’à force de ne distiller qu’au compte-gouttes les informations, comme elles ont fini par en prendre l’habitude, nos dirigeantes ouvrent la porte à tous les fantasmes et à tous les délires. Avec toutes les conséquences désastreuses que cela pourrait finir par avoir…

 

 

 

 

23 heures 30

 

On a passé toute l’après-midi et toute la soirée devant l’ordi à essayer d’en savoir plus. Sans succès. Christopher qu’on y a croisé quelques instants prétend qu’on ne nous laissera pas sortir lundi. Ni jamais. On va d’abord prolonger d’une semaine. Puis d’une autre. Puis d’un mois. Jusqu’au jour où on nous annoncera qu’on est définitivement cloîtrées nous aussi. Parce qu’on court de trop gros risques. Il a été incapable de préciser lesquels. On a fébrilement couru d’un site à l’autre, d’un blog à l’autre sans autre résultat que de démultiplier les interrogations de toute nature. Et de nous entretenir toutes les quatre dans un climat d’inquiétude dont on n’a vraiment pas besoin en ce moment…

 

 

 

 

Dimanche 25 Juin 2034

 

Avec tout ça j’étais complètement à cran hier soir quand je me suis couchée. Dévorée par l’angoisse. J’ai été prise d’une interminable crise de larmes. Valentine m’a tout doucement prise contre elle, caressé les cheveux, les lèvres, murmuré des mots apaisants à l’oreille. J’ai redoublé de sanglots. Elle était beaucoup trop gentille avec moi… Et moi, je n’étais qu’une égoïste qui n’en faisait qu’à sa tête. Je me suis traitée de tout. Accusée de tout. Je ne méritais pas de vivre. Et tant mieux s’il était en train de se passer quelque chose. N’importe quoi. Tant mieux si je crevais. Parce que j’en pouvais plus de tout ça. De me demander sans arrêt ce qui allait encore nous tomber dessus. Qu’on puisse plus être sûrs de rien. Jamais. Il lui a fallu beaucoup de temps et de patience pour me calmer et me rassurer. Je ne me suis endormie, épuisée, dans ses bras qu’au petit matin.

 

Au réveil elle m’a fait doucement l’amour. Tendrement. On est restées longtemps blotties l’une contre l’autre. Sans parler. J’ai de la chance – beaucoup de chance – d’avoir Valentine. Je n’ai jamais été aussi amoureuse d’elle. Aussi amoureuse de qui que ce soit. Et ça ça n’a pas de prix…

 

 

 

 

Mardi 27 Juin 2034

 

Les informations de Christopher étaient fausses. La vie a normalement – si on peut dire – repris son cours hier matin. Comme si de rien n’était. Et on n’a pas jugé bon de nous fournir quelque information supplémentaire que ce soit. La version officielle reste celle d’une tentative d’extermination définitive du virus. Beaucoup sont sceptiques. D’autant qu’on rapporte des témoignages bizarres : il y aurait eu d’importants mouvements de troupes du côté de Lille, des arrivées massives de prisonnières à Rennes et à Draguignan. On parle d’une tentative de coup d’Etat déjoué avant d’avoir pu être mis à exécution. Mais qui ? Pourquoi ? Comment ? Personne n’en sait rien. Le sentiment qui prévaut de plus en plus c’est qu’il se passe une foule de choses derrière notre dos dont on estime qu’il n’est pas nécessaire de nous tenir au courant. A force de jouer avec le feu, « là-haut », elles risquent fort de se brûler…
Par Fabien - Publié dans : 2034
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Lundi 27 octobre 1 27 /10 /Oct 06:07

Mercredi 21 Juin 2034

 

Plus le mois de Juillet approche et plus j’ai le moral dans les chaussettes. Parce que le mois de Juillet c’est forcément là-bas, chez grand mère. Ca a toujours été comme ça et elle ne comprendrait pas que je déroge à la tradition. Ca l’achèverait la pauvre femme. Déjà qu’il paraît qu’elle ne va pas très fort. Ce sera, comme d’habitude, à mourir d’ennui. Elle va ressasser toujours les mêmes petites histoires et se plaindre de tout et de tout le monde. Avec une préférence pour des gens que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam. Contre lesquels il va absolument falloir que je prenne parti et que je lui donne raison. Je vais revenir de là-bas avec le moral complètement délabré. Si seulement Valentine avait pu m’accompagner !… Mais Valentine a aussi une mère qu’il faut bien qu’elle voie de temps en temps et chez qui Zanella va l’accompagner. A son grand désespoir… - Fais un effort… C’est ta grand mère… J’ai essayé de tendre la perche à Monelle qui, du coup, va se retrouver toute seule… Et si elle m’accompagnait ? C’est pas désagréable La Rochelle… Du moins ce qu’il en reste… Ce qui n’a pas encore été englouti par le eaux. Et puis on essaierait de s’échapper le plus souvent possible toutes les deux… Ca nous rappellerait les vacances qu’on passait ensemble quand on était gamines… - Hein ?!… Qu’est-ce que tu en dis ?… Elle n’était pas vraiment enthousiaste… J’ai insisté… - Ca nous permettra de nous retrouver un peu toutes les deux… Ca nous ferait pas de mal… Elle m’a fait comprendre, à demi-mot, qu’elle avait d’autres projets. Que l’absence de Zanella allait bien l’arranger. Encore une histoire de nana là-dessous. Je me suis discrètement éclipsée. Tant pis. J’irai toute seule à La Rochelle.

 

 

 

 

Jeudi 22 Juin 2034

 

- Alors ?… Les yeux d’Iliona brillaient… - Alors quoi ?… - On est jeudi… - Ben oui, on est jeudi, oui… Et alors ?… - Elle est pas venue la fille ?… C’est toujours le jeudi qu’elle vient… Elle avait remarqué ça, elle !… Moi pas… Mais en attendant, non, elle était pas venue… - Elle viendra peut-être plus… - Ca, ça m’étonnerait… - Il y a plus que jeudi prochain… Après c’est les Vacances… Elle s’est penchée, avec des mines de conspiratrice, sur son sac, en a extirpé un gros cahier noir… - Tiens, tu liras ça… Mais t’en parles à personne, hein, surtout !… Tu me promets…

 

 

 

 

22 heures

 

J’ai lu tout d’une traite, à peine rentrée, le cahier d’Iliona. Ce sont des histoires, les unes très courtes, les autres un peu plus longues, qui tournent toutes obstinément autour du même thème : une femme que courtisent et désirent tous les hommes triomphe de toutes les rivales qui marchent sur ses brisées. Dans l’un de ces récits – le plus significatif peut-être – l’héroïne, une sorte de princesse orientale, règne sur une cinquantaine de mâles tout à sa dévotion. L’une de ses distractions favorites consiste à en convoquer un, pris au hasard, et à faire défiler lentement devant lui, à intervalles réguliers, des femmes magnifiques entièrement nues. S’il bande la femme est fouettée jusqu’au sang, parfois même, si tel est son bon plaisir, exécutée. Dans un autre récit, très proche du premier, ce sont des femmes spécialement formées à la lutte qui sont mises en scène. Que l’une d’entre elles provoque la moindre érection chez le mâle et c’est contre la princesse-héroïne qu’elle doit se battre, une princesse-héroïne qui lui inflige la raclée de sa vie et la contraint à demander grâce, une grâce qu’elle joue à pile ou face. Dans beaucoup de ces histoires des femmes sont contraintes d’assister aux ébats d’une autre avec un homme qu’elles convoitent toutes…

 

Je dois reconnaître que, si elle m’a fascinée, cette lecture m’a aussi mise quelque peu mal à l’aise. Ce sont des fictions, oui, mais des fictions qui la mettent totalement à nu. Est-ce qu’elle en a vraiment conscience ? Evidemment oui. Elle est tout sauf naïve. Ou stupide. Alors ce que je me demande c’est pourquoi elle a éprouvé le besoin de me les faire lire à moi. Et pourquoi maintenant ? Tout simplement pour partager avec l’une des seules personnes dont elle se sente proche des fantasmes qui la hantent ? Et qu’elle ne réalisera jamais. Après tout c’est moi qui lui ai tendu la perche en lui parlant de cette fille qui vient docilement chercher auprès de moi sa ration de gifles. Pourquoi n’entrerait-elle pas, elle aussi, en confidences ? Je ne crois pourtant pas que ce soit la seule explication. Iliona hait les femmes. D’une haine farouche qui a toujours existé, qu’elle m’a avouée sans détours et qui, dans le contexte actuel, prend une ampleur démesurée. Les derniers textes de son cahier sont à cet égard tout à fait significatifs. Autant les hommes sont omniprésents et uniquement préoccupés d’elle dans les tout premiers – ceux qui ont été écrits avant le virus – autant ils disparaissent presque complètement par la suite. Ils ne sont plus que rêvés. Comme c’est aujourd’hui le cas dans la « vraie vie ». Ils ne sont plus là et pourtant les femmes sont punies, dans ces dernières histoires, beaucoup plus cruellement encore que lorsqu’elles constituaient des rivales. Parce que leur existence même ne cesse de lui rappeler qu’elle est désirable et qu’elle n’est pas désirée. Qu’elle ne peut plus l’être. Leur seul crime c’est d’être des filles avec lesquelles elle ne peut plus entrer en rivalité. Dont elle ne peut plus triompher. Et elle veut – et il faut – qu’elle le leur fasse payer. Cher. Avec une violence inouïe. Qui reste pour l’instant virtuelle. Purement littéraire. Moi, avec cette fille, je suis dans le réel. Ce qu’Iliona attend de moi – et ce cahier constitue à l’évidence un appel du pied dans ce sens – c’est que je l’y entraîne dans mon sillage. Je ne suis pas sûre de le vouloir. Hors de question que je me laisse dériver avec elle vers des excès qui ne me correspondent pas. Et puis nous ne sommes pas du tout sur la même longueur d’ondes : elle, elle veut lutter et vaincre. L’emporter. Après ça ne l’intéresse plus. Pour moi, c’est à ce moment-là que tout commence…
Par Fabien - Publié dans : 2034
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Jeudi 23 octobre 4 23 /10 /Oct 06:10

Lundi 19 juin 2034

 

J’ai eu beau frapper… tambouriner tant et plus. Personne. Et la porte était fermée à clé… - Ho !… Il y a quelqu’un ?… Sérane, tu es là ?… C’est la voix de Melline qui a fini par me répondre… - C’est pas bientôt fini ce bordel ?… - Elle est pas là Sérane ?… - Elle est là, si !… Mais elle veut pas te voir… Alors tu te casses… Et tu remets plus jamais les pieds ici… C’était quoi cette histoire ? Du jour au lendemain comme ça sans raison ? Il avait dû se passer quelque chose, mais quoi ? J’ai arpenté le trottoir, perplexe, indécise. J’avais au moins droit à une explication. Je suis revenue, j’ai hésité, je suis repartie. J’ai fait les cent pas sur le trottoir incapable de prendre quelque décision que ce soit. Je m’apprêtais à essayer de lui téléphoner quand Sérane est apparue, tout sourire, au coin de la rue… - T’es déjà arrivée ?… Je t’attendais pas si tôt… Mais fallait monter… Fallait pas rester là… - Elle m’a jetée Melline… - Hein ?… Oh, la garce, elle va me le payer… Elle a surgi là-haut comme une furie… Qu’est-ce que je t’avais dit ?… Qu’est-ce qu’on avait dit ?… Alors tu te tires… Tu dégages… Et cette fois c’est pour de bon… Elle l’a poussée vers l’escalier, dans l’escalier qu’elle a dégringolé sur les fesses… Elle lui a jeté des affaires en vrac, pêle-mêle, des vêtements, un radio-réveil, deux casseroles, des assiettes qui sont allé s’écraser en bas… - Et voilà !… On aura la paix maintenant… Viens !… Viens !… J’ai trop envie… Depuis le temps… Et on a roulé sur le lit.

 

- Tu te remettras pas avec ?… - Si !… Sûrement… Mais je vais d’abord la laisser mariner un peu dans son jus… Elle en prend beaucoup trop à son aise ces derniers temps… Faut qu’elle sente le vent du boulet sinon… - Elle est partie où ?… - Oh, pas bien loin… Elle doit être en train de chialer dans la cour derrière… Ou elle est allé faire un tour sur la jetée… Et dans deux heures grand maximum elle sera là à me supplier, à me promettre tout ce que je veux, à se mettre plus bas que terre toute seule comme une grande… - Et t’aimes ça, hein !… - J’aime pas… J’adore… Sinon il y a longtemps que je l’aurais larguée pour de vrai… Et toi, cette fille à la fac ?… - Elle est venue en rechercher une couche… - Que tu lui as passée… Evidemment… T’as pris ton pied ?… - Oui… Et moi ça me fait peur… - Peur ?… Pourquoi peur ?… - Je me demande jusqu’où je suis capable d’aller… Je lui en veux à cette fille… Tu peux pas savoir ce que je lui en veux de m’obliger à me regarder en face… Comme je suis… C’est ça que je supporte pas surtout… C’est de ça que je la punis… Et, du coup, c’est un cercle vicieux… - Oui, oh ben tu sais, c’est chez presque tout le monde qu’il y a des tas de trucs qui se mettent à remonter comme ça maintenant. De plus en plus. C’est obligé. On est dans un monde que de nanas. Les hommes nous manquent. Leurs queues nous manquent. Du moins à la majorité d’entre nous… Comment tu veux qu’on soit pas bourrées de frustrations et qu’on s’en prenne pas les unes aux autres ? Qu’on se fasse pas payer ? Ca sert à rien de chercher à nous voiler la face et de vouloir nous faire passer, à nos propres yeux, pour ce qu’on n’est pas… Et tu veux que je te dise ? Eh ben nous on est beaucoup moins dangereuses finalement que celles qui adoptent des postures angéliques, qui se veulent tout amour et toute bonté et qui, réfugiées derrière ces belles façades, se comportent d’autant plus comme des saloperies qu’elles sont persuadées qu’elles n’en sont pas. En empruntant toutes sortes de chemins détournés… Nous au moins c’est clair, c’est direct… Celles qui nous tombent entre les griffes c’est en toute connaissance de cause. Elles savent à quoi elles s’exposent. Elles savent ce qui les attend… Que ce soit Melline ou cette fille là-bas elles sont libres… On ne les retient pas… Elles restent ?… C’est qu’elles le veulent bien… - Elles ne peuvent peut-être pas faire autrement… - Ca, c’est leur problème…

 

On a passé la fin de la matinée dehors… - Parce que sinon elle va pas tarder à nous retomber dessus l’autre… Et on a quand même bien le droit à un peu de tranquillité toutes les deux, non ?… L’après-midi aussi… Sur la plage… Et la soirée… Indéfiniment prolongée au restaurant…

 

Quand on est rentrées elle était assise sur la dernière marche de l’escalier tout en haut… - Qu’est-ce que tu fous là, toi ?… T’es venue baisser ton froc pour que je te reprenne, c’est ça !?… Eh ben vas-y !… Baisse-le!… Qu’est-ce t’attends ?… Oh, et arrête de chialer comme ça sans arrêt… Tu m’agaces… Et elle lui a claqué la porte au nez… Ca a timidement gratté… - S’il te plaît, Sérane, laisse-moi rentrer… S’il te plaît… Ca peut pas finir comme ça nous deux… Je ferai ce que tu voudras… Tout ce que tu voudras… Je te promets… - J’ai déjà entendu ça dix mille fois… - Oui, mais cette fois… Elle lui a brusquement ouvert… - Eh bien on va voir… Vas-y !… - Vas-y quoi ?… - Baisse ton froc !… Il y a que ça que tu sais faire n’importe comment… - Pas devant elle !… - Si !… - Tu peux pas me demander ça… - Eh bien casse-toi alors !… Et elle l’a poussée vers la porte… - Non !… Non !… Attends !… Attends !… Je vais le faire… - Oui, mais tout de suite alors !… Grouille !… Elle nous a tourné le dos et elle l’a baissé… La culotte aussi… Jusqu’en bas sur les chevilles… - Tu vois, j’en fais ce que je veux… Tout ce que je veux… Tu peux rester, toi… Va dans la chambre… On a à parler toutes les deux Roxane et moi…

Par Fabien - Publié dans : 2034
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Dimanche 19 octobre 7 19 /10 /Oct 19:27

Vendredi 16 Juin 2034

 

La fille était là. Elle attendait. A l’évidence elle m’attendait. J’ai éclaté de rire. D’un rire moqueur. Offensant… - Ca t’a pas suffi la baffe de l’autre fois ?… Elle ne m’a pas répondu. Elle m’a seulement regardée. Contemplée d’un amour éperdu tout le temps que j’ai passé devant la glace. Cette fois j’ai su que j’allais le faire. Je me suis approchée. Elle n’a pas cillé… - A genoux !… Mets-toi à genoux !… Elle a obéi. Lentement. Sans me quitter des yeux. Des yeux de bon chien-chien fidèle. Je l’ai giflée. De toutes mes forces. Chaque joue à tour de rôle. Huit fois. Dix fois. Douze fois. Je ne sais pas : j’ai pas compté. Sa tête ballottait de droite à gauche, de gauche à droite. Elle ne disait rien. Elle continuait à me regarder… Je l’ai plantée là… Quand j’ai claqué la porte elle était toujours à genoux…

 

C’est encore à Iliona que j’ai éprouvé le besoin de raconter tout ça en amphi juste après… Iliona qui m’a attentivement écoutée… Qui a raconté à son tour… - Quand j’étais petite j’arrêtais pas de me battre avec les autres filles… J’adorais ça… Je te rentrais dans de ces états !… Surtout que je m’en prenais toujours à des plus grandes ou à des plus costauds que moi… Je faisais le désespoir de ma mère… Ado, j’ai arrêté… C’est pas l’envie qui m’en manquait, non, mais  ça se faisait pas… C’était pas féminin… Ca correspondait pas à l’idée que je voulais donner de moi… J’ai bien mis encore deux ou trois peignées, mais en tête à tête. Sans témoins. Toujours pour des histoires de mecs. Mais les mecs maintenant, quand bien même on le voudrait, il y a plus de risque qu’on se batte pour eux… J’y pense pourtant des fois… Quand il y en a une que je peux pas voir – et il y en a plein que je peux pas voir – ou avec qui je me suis engueulée, après, le soir, quand je suis toute seule, j’imagine qu’on s’étripe… Pour un mec… Je te lui en colle une de ces sévères. Je la laisse carrément sur le carreau, oui. Et je pars, triomphante, au bras du mec… Ca me détend… Ca me fait un bien fou… On est conne des fois…   

 

Je ne le lui ai pas dit, mais moi aussi gamine… Je ne me battais pas, non… Je faisais pire. Je battais. J’avais mon souffre-douleur attitré. Une fille à ma botte. Qui me portait mes affaires. Me rendait de menus services. Que je remerciais d’une paire de gifles quand bon me semblait. Qui acceptait tout. Absolument tout pourvu que ça vienne de moi. J’étais odieuse. Résolument odieuse. Elle s’en accommodait. Plus elle se montrait servile – ce que j’exigeais d’elle – et plus j’en rajoutais dans l’abject. Plus je l’humiliais. J’étais suffisamment tortueuse pour savoir donner le change vis à vis des autres : parents, instits, camarades qui nous pensaient copines. Mais quand j’étais seule avec elle !… J’avais les pleins pouvoirs. J’en usais et en abusais. Je lui ai imposé des choses absolument monstrueuses dont je n’ai vraiment pas lieu d’être fière. Je ne le suis pas.  Ca a duré trois ou quatre ans. Jusqu’à ce que j’entre en cinquième, je crois. Jusqu’à ce que ses parents l’emmènent. En Argentine ou au Pérou. En Amérique du Sud en tout cas. J’avais oublié tout ça. J’avais essayé de l’oublier. J’y étais parvenue tant bien que mal. Et il faut que ça me retombe dessus. Que l’autre dinde vienne s’offrir pieds et poings liés. Se jeter dans la gueule du loup. Le plaisir que j’ai éprouvé tout à l’heure à l’avoir totalement à ma merci c’est exactement le même que celui que j’éprouvais alors. En plus intense encore peut-être. En plus exaltant. Et je vais la faire payer. Je sais que je ne pourrai pas m’empêcher de la faire payer – et cher – pour m’avoir fait remonter tout ça. Que je croyais définitivement enfoui. Définitivement éradiqué.

 

Pourquoi elle ? Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? Est-ce qu’elle a perçu quelque chose ? Quelque chose qui était en train d’affleurer en moi et dont je n’avais pas conscience ? Que les événements actuels réactivaient à mon insu. Sans doute. Parce que je suis cernée. De tous côtés. Il y a cette fille, oui. Mais il y a aussi Sérane qui, comme par hasard, vit quelque chose du même ordre avec sa copine, et qui me tombe dessus à la plage. Et maintenant Iliona dont j’étais à mille lieues d’imaginer qu’elle pouvait éprouver une telle jubilation à se battre et qui m’en parle. Pour la première fois depuis qu’on se connaît. Si elle le fait c’est qu’elle sent que maintenant elle peut le faire. Que je suis RECEPTIVE…

 

 

 

 

22 heures

 

Valentine ne m’accompagnera pas demain. J’ai eu beau insister et insister encore. Il n’y a rien eu à faire… - Ce n’est pas un reproche, mais si c’est pour passer deux jours à t’attendre dans une chambre d’hôtel comme la semaine dernière… - J’avais pas le choix… Si on voulait pas que ça paraisse suspect… - Je sais bien… Mais ce sera la même chose demain… Et toutes les fois suivantes… Tu n’as plus aucune espèce de raison plausible de venir à l’hôtel avec elle maintenant… Et moi je n’ai plus la moindre chance de vous voir ensemble… - On sait pas… On peut jamais savoir… - Bien sûr que si !… Mais ça fait rien… Profites-en !… Amuse-toi !… - Je suis pas obligée d’y aller, hein !… Je peux rester là avec toi… Je préfère même… Ou bien alors on va ailleurs… Toutes les deux… Et je me trouve quelqu’un d’autre… Que je me débrouille pour ramener à l’hôtel… Tu pourras nous regarder tant que tu veux… - Ca se décide pas comme ça… Ca se prépare. Soigneusement. Et puis c’est pas de ça dont t’as vraiment envie pour demain… - Mais si !… Si !… - De toute façon j’ai prévu autre chose…

 

Même elle… Même elle, sans le savoir, elle m’y envoie tout droit…
Par Fabien - Publié dans : 2034
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